Conçu à la croisée de trois univers, celui de la compositrice de musique électronique Jessica Ekomane, du quatuor de sonneurs mené par Erwan Keravec et du vidéaste Thierry Salvert, « Latitudes », ni vidéo-clip ni captation, est un objet hybride, sonore et musical, graphique et filmique.

   Le point de départ est une commande d’Erwan Keravec auprès de la compositrice Jessica Ekomane. Qui livrera une partition accompagnée d’une bande-son, comme un cinquième membre invisible, piste sonore échantillonnée en amont de la matière-même du quatuor, ses bourdons, ses tonalités, jusqu’à ses respirations, ses bruits de bouche et autres sons inhabituels, habituellement inaudibles.

   S’emparant de cette texture électronique et se coulant dans cette partition contemporaine, dense et minimaliste, qui leur correspond, les quatre sonneurs poursuivent alors l’exploration du champ étendu de leurs instruments, dessinant un espace de résonances musicales et temporelles, comme sous la voûte d’une cathédrale en devenir.

   Invité à collaborer à la nouvelle création du quatuor, le vidéaste Thierry Salvert, lequel a déjà accompagné Erwan Keravec au sein du groupe Nozef, est particulièrement touché par « Latitudes » : le trouble qui s’en dégage, la dimension quasi-vibratoire qu’y prennent les instruments à vent traditionnels, l’omniprésence du souffle, cet entrelacs de superpositions (« on ne sait plus qui joue quoi »), tout cela fait écho à sa propre sensibilité de vidéaste. Erwan lui donne carte blanche.

   Aux triturations, ondulations et strates sonores de « Latitudes », Thierry Salvert superpose alors les siennes, visuelles : lumineuses, scintillantes, colorées, contrastées, graphiques à la manière des arbres, mouvantes à la façon d’une eau. Travaillant par couches à la manière d’un peintre, l’image est ainsi décomposée puis recomposée dans une respiration toute organique.

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